Texte du sujet: Surnaturel, sujet 3 : "Danse macabre"

Sous les hautes futaies passe un souffle massif.
Les gouttières du temps tremblent dans la lumière
Calme, sous les chênes et les ifs.
Arrive alors l’odeur des chairs,

Lourde, fauve, planant
Jusqu’aux faîtes des cimiers
Montés sur des soldats blancs
De la couleur de mes épées,

Parfum dur, méphitique,
Rampant aux portes de la ville –
Viande crue, membres obliques
Noyés de métal et de bile.

 

Dans la passe ils ont fondu
Comme des rapaces sur un rat
Dans la passe les rapaces
Nous ont eus ;

Dans la passe les longues flèches
Ont plu droites sur nos têtes
Et les rapaces ont ripaillé
Sur les cadavres, pies-grièches

Affairées, minutieuses, à écorcher
Des mains sur des pieux brûlants,
A sculpter sur des scalps quelque image
Divine. J’attendais sous le feu du ciel.

 

L’heure vint de se repaître
Ensemble, le nez dans le sang
Caillé, par les vallées champêtres
Où j’embrassai mes liges, indécent,

Sur la blessure béante et rousse
Comme une hampe de pivoine,
J’entraînai les corps en douce
Par des pas sûrs de courtisane :

Dans les fossés de foin suri
Je chantai clair pour tout le bois :
Le Faucheur vient après la pluie,
Le Faucheur est venu pour toi !

 

J’ai senti, près de mes reins,
Le souffle lourd des chairs ouvertes :
C’était sa main blanche et sereine,
Trempée de mon sang noir enfin,

Sa main longue qui battait
La cadence d’un autre monde ;
Je me suis glissé dans ses brumes
En entrechats et pas de deux ;

Il a levé sa grande faux
Ainsi qu’un homme sur du blé
Mûr, après la pluie
D’été.

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