Texte du sujet: "Souvenirs" - Sujet 2 : "Le Grenier de Grand-Mère"

 

La trappe au plafond qui permettait l’accès aux combles me semblait inaccessible lorsque j’étais enfant. Le grenier me donnait toujours envie d’aller le visiter en cachette, il excitait ma curiosité… Mais il eut été trop ardue d’y pénétrer, avec ma petite taille d’enfant de 7 ans. Cette maison, c’était la maison de l’été, la maison des vacances. Celle de mes grands-parents, désormais disparus. Le grenier, je n’y avais jamais mis les pieds. Je l’avais simplement entraperçu. Une trappe au plafond, la vision de quelques poutres de bois et de cartons posés ça et là…

Alors que je grimpais les marches de la petite échelle, je fus frappé par l’odeur forte qui m’entoura d’un coup. Naphtaline. Bois usé. Quelque chose d’autre, plus discret mais piquant, que je ne parvenais pas à définir. Je fis tourner mon regard tout autour de la pièce. Des dizaines et des dizaines de cartons, 3 vieilles chaises, un bureau (lui-même plein d’autres cartons). Un vélo sans roue…

Je fis quelque pas, soulevant des vagues de poussières. Entre quelques piles de linge se tenait un vieux tourne-disque, en bois. Je le connaissais, j’en étais sûr. Je l’avais oublié mais je le connaissais. Les souvenirs revinrent à la vitesse d’un train fou. Ils sont encore jeunes. Ils dansent. Une valse, je crois. Moi qui considérais, enfant, mes grands parents comme des adultes austères, stricts et réservés, je revois aujourd’hui le sourire radieux de ma grand-mère, les yeux amoureux de mon grand-père, leurs rires qui s’entrechoquent dans le salon transformé en salle de danse.

Je me relevais après avoir examiné l’objet de plus prêt, l’avoir caressé doucement pour en enlever la poussière. Toujours flottante dans l’air, cette odeur que je ne retrouvais pas. Je me dirigeai vers le bureau, ouvris quelques tiroirs, remplis de papiers, de vieux stylos à plume, de quelques vieilles photos. Ici, mon grand-père sur le port avec des amis, ou des collègues, je ne savais pas. Là, une minuscule boîte à musique, avec une toute petite manivelle, que je remontais tout doucement, pour ne pas la casser. L’objet ne me disait rien du tout. La mélodie, en revanche… Elle chantait à mes oreilles, activait mes synapses, réveillait ma mémoire. Une comptine enfantine que mon grand-père me chantait afin de m’endormir, lorsque j’étais tout bébé. Au seuil du sommeil, lorsque je perdais peu à peu conscience, il arrêtait de chanter, remontait la boite à musique et la posait sur la table de nuit, puis la laisser jouer tandis qu’il sortait de la chambre. Je revivais tout cela, de manière si claire, si forte, je voyais les images, j’entendais sa voix, je sentais son odeur. Comme si c’était hier…

Un peu sonné, je fis quelques pas au hasard. Suivis l’odeur qui m’obsédait de plus en plus depuis mon entrée dans la pièce. Une grande malle noire, ouverte. À l’intérieur, des épices, des crèmes, de l’encens, quelques bouteilles de parfum, vides ou presque vides. Poivre noir, noix de muscade, coriandre… D’autres choses, que je goûtais du bout de la langue, sans parvenir à trouver ce que c’était. Clou de girofle… Cannelle. Je retrouvais dans ma bouche le goût du pain d’épice que ma grand-mère nous préparait pour le petit déjeuner. Enfant, je détestais ça… Alors que ma mémoire, par je ne sais quel mécanisme, transmettait à mon palais le souvenir de ces saveurs d’antan, je devais bien l’admettre : ce n’était pas si mauvais… Une maison vide, un grenier perdu, quelques odeurs et sons oubliés… On n’imagine pas les trésors que l’on peut retrouver.  

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plancton2000
sublimation par la mémoire. j'aime bien cette douce synesthésie !
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