Fin Décembre, Orléans – sa forêt, en tout cas-.
J’ai toujours aimé cette forêt. Les arbres, majestueux, même s’ils sont maintenant dénudés. Les feuilles mortes, l’humus. Les fougères. Je pourrait passer la journée à marcher et à respirer dans la forêt. Et là, ça faisait trop longtemps que je n’avais pas été comme ça dans la nature. Trop longtemps, même si … C’est un peu trop tôt, aussi.
Mais la dernière fois, c’était l’été dernier. Ah, la chaleur d’août, les journées ensoleillées au bord du lac, chapeau de paille sur la tête, en surveillant la canne à pêche d’un œil. Se balader, tranquillement, entre les pins, flâner, discuter, et tout ça … sans se presser.
***
Là, la nuit tombe. Le soleil est encore probablement dans le ciel, mais ici, cachés par les arbres, il commence à faire obscur. Ah, et la pluie ! Une pluie de Décembre, fine et froide, qui finit par rentrer dans les vêtements, qui s’agrippe aux lunettes en les constellant de gouttelettes. Évidemment, la terre commence à être saturée, je devrais d’ailleurs plutôt dire « la boue ». Qui s’accroche aux chaussures, les fait glisser, et laisse des traces, surtout quand on a fait quelques plongeons à cause d’elle ...
Alors que cet été, la tombée du soir c’était plutôt le barbec’ sur la plage, avec le bruit des vagues en fond sonore, la chaleur qui diffuse du sable et du feu, les bières et les autres bouteilles qui passent, la discute avec les potes, et le sable. Le sable chaud, qui glisse entre les orteils, qui s’écrase quand on s’assoit, et qui s’infiltre partout. Réellement partout
***
Un bruit dans les fourrés, et c’est un sanglier qui surgit … Attention ! C’est assez sauvages ces bêtes là. Une petit glissade en s’arrêtant de courir, se rattraper aux arbres, et s’étaler de tout son long dans la boue, c’est fait. Il insiste un peu, vient renifler alors que je suis au sol, me pousse du groin, mais, heureusement, il s’en va. Enfin.
Cet été, c’était plutôt le blaireau bourré qu’on avait croisé. Le genre d’humain déjà pas futé en temps normal, avec plus d’une bouteille dans le nez (et plus que de la bière, dans cette bouteille). Le résultat n’était pas glorieux. Il nous avait saoulé – au figuré cette fois -, puis était reparti vadrouiller le long de la plage.
***
Je me relève, crotté, pas trop blessé apparemment, et je me remets à courir. La forêt continue de défiler. Un peu avant, je m’essoufflait, puis j’ai trouvé mon second souffle. Avant ma glissade devant monsieur le sanglier, malheureusement, et ça m’a coûté une partie de ma respiration … Surtout que je viens à nouveau de m’étaler. La forêt est traître en cette saison. On ne voit pas ce qui se passe, on n’entends que le bruit de la pluie qui couvre tout le reste -quasiment en tout cas, et ce qu’elle laisse passer n’est pas tout à fait que qu’on voudrait entendre-.
L’été aussi, c’est parfois traître. Par exemple le susdit blaireau, qui était revenu, après avoir erré on ne sait où. Après avoir vomi, manifestement. Bref, on l’a envoyé bouler … Sauf que littéralement. Et que, pas de chance, il a roulé droit la nuque sur les bouteilles. Je sait pas si ça fait mal, par contre ça fait de l’effet. Un effet fatal en fait, quand on tombe pile à la renverse, la nuque pile sur le goulot des bouteilles qu’on avait planté dans le sable. Le coup du blaireau, qu’on a rigolé plus tard, quand on pensait que c’était fini. Ah, c’était efficace, mais on s’est retrouvé avec un cadavre sur les bras, et, à ce moment-là de la soirée, on n’était pas les plus frais pour gérer ça. « Heureusement », quelqu’un à eut une bonne idée : La baraque. Celle qui paraît vide, en bord de plage, mais où il doit y avoir quelqu’un, parce que des chiens sont tout le temps dans le jardin, et que quelqu’un doit bien s’en occuper ; mais bon, on n’a jamais vu personne, même les quelques uns qui se sont parfois amusés à exciter les chiens. Pas que ce soit bien difficile, d’ailleurs, vu les clebs en question. Au final, on est reparti avec les aboiements et les hurlements des chiens dans les oreilles, qui nous ont fait fuir vers une autre plage. Ah, ces chiens, on se rappellera tous du bruit qu’ils faisaient cette nuit-là.
***
Et tout en continuant de courir dans la forêt, je sais que je m’en rappellerais jusqu’à ma mort. D’ailleurs … Ils sont toujours là, derrière moi, je les entends. Et je ne vais malheureusement pas avoir à m’en souvenir encore bien longtemps.
Finalement, c’était bien l’été dernier, même si ça aura, effectivement, été mon dernier ...
Commentaires réservés aux utilisateurs inscrits.