["Dans diverses communautés indigènes amazoniennes, l’ayahuasca est traditionnellement utilisé pour entrer en transe dans un but divinatoire ou comme outil thérapeutique et comme puissant outil de purification lors de rituels de guérison sacrés. Cette boisson semble être consommée depuis 4 000 à 5 000 ans" - Wikipédia]
Ils chantent, mon nom de fable toute la nuit ils chantent. Les vers luisants s’attroupent autour des feux morts, les cris du condor déchirent la foule indivisible des âmes à mois données. Souffle fauve des haleines qui passent sur mon corps irrespirable, souffle chaud d’angoisse et de délire mystique. Et que tu te lacères, étoffe opaque de la montagne. Le chaman porte le bois de lumière, qui le mord, à ses lèvres, écroulent les anciens remblais de la falaise dans une excuse hilare.
Foudre alors, foudre abattue sur les toits, des lianes pendant au travers des lacs mes enfants fauchés dans le ciel du coupe-coupe. Ils s’agenouillent dans la boue fondamentale et vomissent tour à tour. Jet de cendres par-delà les confins de la mémoire. Je m’alanguissais sur le fleuve vierge, le fleuve de détours fastueux, le fleuve où je m’agenouillai, vomissant à l’unisson de toutes les bouches à moi vouées et revenue à ma mère de liquide et de heurts.
Ils chantent mon nom de fable toute la nuit ils chantent. A. Ya. Hua. Filigrane de tous les âges je leur suis entrée dans les veines, A, Ya, Hua, Sca, ils chantent au sein de la paisible canopée les échardes furieuses du miracle – qu’as-tu flora, qu’as-tu mycélium enchanté, en quel gué as-tu pensé passer le fleuve et quand t’a-t-il repris la cheville unie de lianes ? Ils chantent le visage enfoui dans les feuilles, mes feuilles, j’infuse leur sang d’une jouissance impérative. A, ya, hua, sca. Je me balance de lune en lune, de viscère en larme, panache incandescent sur la chaussée des synapses à moi données. Je suis dans le vomi comme une éruption de rêve. Foudre maintenant sur des mains en coupe, prière in-édite, prière tue pour toujours où la pluie me crevasse. Réincarnée dans l’immensité de leurs pupilles, je bondis et je hurle à la face des toucans Voyez mon éternité naître à jamais dans la transe clairvoyante ; pure et multiple je pénètre le corps des purs jusqu’à épuisement définitif, ô mes enfants de vive chair dont je démembre la conscience. Je suis devenue, depuis ma stase à l’envers du monde, depuis la lenteur chlorophyllaire de chacruna je suis devenue fulgurance cosmique, antenne fabuleuse du nuage de foudre jusqu’au noyau bouillonnant de la terre, hiérophante viride aux nervures d’or.
Une main mille mains baptisées par le condor de lumière se poseront bientôt aux arêtes du bois qui mord, ma fleur glissera sur le rebord du bol. D’autres lèvres, les mêmes mais d’autres, à ma sève viendront recueillir l’absolu, dans la plus offerte sauvagerie, de mon poison ultra-lucide ; lianes du grand berceau fertile, nous tremperons dans l’eau des hommes rapides à nous donnés. Elixir de foudre. Ta nuit s’arrache des troncs comme un serpent au limon noir, elle descend te prendre. Je te voue tous les ciels, les écorces, les hémorragies divinatoires. Désormais ton œil est un puits néantique, le bruissement des feuilles une fractale amie. Tu marches au devant de déités extatiques, par des chemins de sueur, la gorge refluant vers des torrents irrésistibles.
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